Le projet de loi Macron pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques qui s’articule autour de trois grands principes « libérer, investir, travailler » a été modifié puis adopté en dernière lecture par le Sénat le 1er juillet dernier.
Il sera prochainement réexaminé par l’Assemblée Nationale, étant précisé que la Présidence de la République et le Gouvernement souhaitent qu’il soit validé avant la mi-juillet.
Les principales mesures intéressant le droit social sont les suivantes :
1°Le plafonnement des indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse
En cas de licenciement d’un salarié dépourvu de cause réelle et sérieuse et si l’une ou l’autre des parties refuse la réintégration du salarié dans l’entreprise, l’article 87 D du projet de loi prévoit que le juge octroie au salarié une indemnité exprimée en mois de salaire fixée en fonction de l’effectif de l’entreprise et l’ancienneté du salarié comme suit :
Effectif de l’entreprise | ||||
Moins |
Entre 20 et 299 salariés |
À partir |
||
Ancienneté du salarié dans l’entreprise |
Moins de 2 ans |
Maximum : 3 mois |
Maximum : 4 mois |
Maximum : |
De 2 ans à moins de 10 ans |
Minimum : 2 mois maximum : 6 mois |
Minimum : 4 mois maximum : 10 mois |
Minimum : |
|
10 ans et plus | Minimum : 2 mois maximum : 12 mois |
Minimum : 4 mois maximum : 20 mois |
Minimum : |
Et ce barème devrait également s’appliquer en cas de prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié en raison de faits qu’il reproche à son employeur (article L 1451-1 du Code du Travail) et en cas de résiliation judiciaire du contrat de travail.
Toutefois, la loi permet au juge de s’affranchir des plafonds d’indemnisation fixés en cas de faute de l’employeur d’une particulière gravité (faits de harcèlement moral ou sexuel, violation de l’exercice du droit de grève, violation du statut protecteur des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle, etc.)
Précisons enfin que les indemnités spécifiques au licenciement économique irrégulier ne devraient ni être remises en cause ni être prises en compte dans le calcul de ces plafonds.
2° Le travail du dimanche et en soirée
L’article 80 du projet de loi prévoit que pour les commerces de détail où le repos hebdomadaire a normalement lieu le dimanche, le maire peut, après avis du conseil municipal, décider de supprimer ce repos dans la limite de 12 par an, contre 5 actuellement.
Cette liste devra être arrêtée avant le 31 décembre, pour l’année suivante.
Par ailleurs, le texte organise une procédure permettant la révision ou la délimitation des zones touristiques et commerciales visées aux articles L 3132-25 et L 3132-25-1 du Code du Travail dans lesquelles les salariés pourront travailler le dimanche et impartit un délai au représentant de la région pour statuer sur de telles demandes (article 75 du projet de loi).
L’article 76 du projet de loi prévoit la possibilité d’accorder le repos hebdomadaire par roulement aux établissements couverts par un accord collectif ou à défaut de tout accord par une décision de l’employeur.
L’accord collectif devra notamment définir la compensation qui sera accordée aux salariés afin de tenir compte du caractère dérogatoire du travail accompli le dimanche et prévoir des mesures destinées à faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés privés de repos.
Par exception, un accord collectif ne sera pas nécessaire pour les établissements de vente au détail situés dans ces zones et employant moins de 11 salariés. Ces établissements ne devraient pas non plus être tenus d’accorder une compensation à leurs salariés.
Par ailleurs, le projet de loi devrait permettre, sous réserve qu’ils soient couverts par un accord collectif, aux établissements de vente au détail qui mettent à disposition des biens et des services situées dans des zones commerciales et touristiques visées aux articles L 3132-24 et L 3132-25 du Code du Travail, de reporter le début de la période de travail de nuit de 21 heures à 24 heures.
La loi offre un certain nombre de garanties aux salariés concernés précisant notamment que seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler entre 21 heures et 24 heures. Leur refus ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement.
3° Modification des seuils sociaux
L’article 87 A du projet de loi porte le seuil de mise en place des délégués du personnel à 21 salariés, contre 11 actuellement.
Il est par ailleurs précisé que les employeurs qui, en raison de l’accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent l’effectif de 21 salariés pour la mise en place des DP, ou de 50 salariés, pour la mise en place du Comité d’entreprise et du CHSCT, continuent de se voir appliquer les règles applicables aux entreprises n’ayant pas franchi ce seuil pour cette année et les deux années suivantes.
L’article 87 B prévoit le report des obligations pesant sur les entreprises d’au moins 50 salariés (désignation d’un délégué syndical, mise en place d’un CHSCT et d’un CE notamment) sur celles occupant au moins 100 salariés.
Enfin, l’article 87 C prévoit la fusion au sein d’une instance unique de représentation du CE et du CHSCT.
4° Suppression de la peine d’emprisonnement d’un an en cas d’atteinte à la libre désignation des IRP ou d’entrave à leur fonctionnement
Si le projet de loi supprime la peine d’emprisonnement d’un an encourue pour avoir porté atteinte à la libre désignation des IRP ou à l’exercice régulier de leurs fonctions, il porte le montant de l’amende encourue de 3.750 € à 15.000 € dans le premier cas, et à 7.500 € dans le second.
5° Les consultations obligatoires du CHSCT inscrites de plein droit à l’ordre du jour
Les consultations rendues obligatoires par une disposition législative ou réglementaire ou par un accord collectif de travail sont désormais inscrites de plein droit à l’ordre du jour du CHSCT par le président ou le secrétaire.
6° Compétence du juge judiciaire en matière d’élections
Les articles 87 et 89 du projet de loi accordent désormais compétence au Tribunal d’Instance pour connaître de toute contestation du nombre d’établissements distincts et des sièges à pourvoir lors des élections professionnelles, qu’il s’agisse d’une décision de l’administration ou d’un accord entre l’employeur et les organisations syndicales.
7° Les mesures relatives aux licenciements économiques
Afin d’améliorer le dispositif de sécurisation de l’emploi, le projet de loi envisage diverses mesures concernant le licenciement pour motif économique.
Ainsi, l’article 98 prévoit que, pour les entreprises soumises à l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi, le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements peut être fixé par accord collectif ou par un acte unilatéral de l’employeur.
S’il est fixé par un document unilatéral, le périmètre ne peut toutefois être inférieur à celui de chaque zone d’emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements concernés par les licenciements.
Par ailleurs, l’entreprise n’adressera plus automatiquement à ses salariés la liste des postes disponibles à l’étranger, le projet de loi prévoyant que le salarié dont le licenciement est envisagé a accès sur sa demande à la liste précise des offres d’emploi situées hors du territoire national disponibles dans l’entreprise ou dans les autres entreprises du groupe auquel elle appartient (article 100).
La définition du motif économique est quant à elle complétée, le licenciement pouvant intervenir suite à des réorganisations destinées à sauvegarder la compétitivité de l’entreprise (article 103 ter).
Et il est également précisé que le motif économique se justifie au regard de la situation de l’entreprise ou, le cas échéant, de celle du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient.
Enfin, en cas d’annulation pour insuffisance de motivation de la décision de l’administration ayant validé un plan de sauvegarde de l’emploi, l’autorité administrative prend une nouvelle décision suffisamment motivée que l’employeur doit porter à la connaissance des salariés licenciés à la suite de la première décision de validation ou d’homologation.
Si cette seconde décision est suffisamment motivée, l’annulation de la première décision est sans effet sur la validité du licenciement et ne donne lieu ni à réintégration ni à indemnisation des salariés.
8° Le Code du Travail et l’Inspection du Travail
L’article 85 du projet de loi autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi les mesures visant à :
- modifier le Code du Travail afin d’abroger les dispositions devenues sans objet et assurer la cohérence rédactionnelle au sein de ce code et entre celui-ci et les autres codes.
- renforcer le rôle de surveillance et les prérogatives du système d’inspection du travail, étendre et coordonner les différents modes de sanction et réviser l’échelle des peines en matière de santé et sécurité au travail.