Le Journal officiel a publié, le 25 juin dernier, dans la plus haute discrétion, une loi votée sans débat par l’Assemblée Nationale qui ajoute aux vingt critères de discrimination listés à l’article 225-1 du Code pénal et aux articles L1132-1 et suivants du Code du travail, un nouveau critère de discrimination tiré « de la particulière vulnérabilité résultant de la situation économique, apparente ou connue de son auteur ».
La « pauvreté » fait donc son entrée dans l’infamant panthéon des marqueurs de discrimination, juste après le lieu de résidence (2014) et l’identité sexuelle (2012)…
Si ce critère fait évidemment référence à l’abus de vulnérabilité visé aux articles 225-13 et 225-14 du Code pénal, il apparaît comme particulièrement large, imprécis et subjectif dans le contexte d’une lutte contre la discrimination et fait craindre une approche purement subjective et imprévisible de ce concept de « pauvreté » apparente ou connue.
Or aux termes de l’article 34 de la Constitution, et selon l’article 8 de la DDHC, le législateur doit définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis. Et c’est sur la base de cette exigence essentielle que le Conseil Constitutionnel a censuré en mai 2012 le texte définissant le harcèlement sexuel (Décision n° 2012-240 sur QPC du 4 mai 2012).
Sans doute aurait-il été utile que ce texte soit soumis à un débat parlementaire, ne serait-ce que pour que ces questions soient posées.
On attendra avec intérêt les première décisions judiciaires et / ou une éventuelle question prioritaire de constitutionnalité.
(Source : loi n°2016-832 du 24 juin 2016 visant à lutter contre la discrimination à raison de la précarité sociale – JO du 25 juin 2016)