- Cass. soc. 05 mars 2025, n° 23-13.802, F-B, Cassation
En juillet 2011, un chauffeur routier était victime d’un accident du travail, puis d’une rechute en mars 2012. Le 1er mars 2017, il était déclaré inapte à son poste par le médecin du travail.
Par courrier du 17 mars 2017, l’employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement. Par courrier du même jour, il convoquait les délégués du personnel pour les consulter sur les possibilités de reclassement, lors d’une réunion fixée au 31 mars à 17 heures.
Licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre recommandée avec AR du 31 mars 2017, le salarié a contesté son licenciement devant la juridiction prud’homale.
La Cour d’appel le déboute de l’ensemble de ses demandes et juge que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse. Pour les juges du fond, en l’absence de solution de reclassement compatible avec l’absence de mobilité géographique du salarié, l’employeur était dispensé de consulter les délégués du personnel, en sorte que le caractère tardif de leur consultation n’avait pas d’incidence sur la procédure.
Sans surprise, la Chambre sociale de la Cour de cassation censure la Cour d’appel : selon la Cour régulatrice, il appartenait à l’employeur de consulter les délégués du personnel sur les possibilités de reclassement avant d’engager la procédure de licenciement.
Cette décision confirme deux obligations importantes de l’employeur :
- D’une part, même lorsqu’il n’existe pas de solution de reclassement compatible avec l’état de santé du salarié inapte, l’employeur doit consulter les représentants du personnel. La consultation porte sur les possibilités de reclassement, ce qui inclut donc l’impossibilité de reclassement.
- D’autre part, cette consultation doit être effectuée avant l’engagement de la procédure de licenciement. Autrement dit, l’employeur ne peut pas convoquer le salarié à l’entretien préalable avant d’être en possession de l’avis émis par les représentants du personnel.
En considérant que l’absence de solution de reclassement exonérait l’employeur de son obligation de consulter les représentants du personnel, la Cour d’appel avait donc méconnu l’article L.1226-10 du Code du travail.
Cette décision est l’occasion de rappeler que seule peut permettre de dispenser l’employeur de rechercher un reclassement et de consulter les représentants du personnel, la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que « tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi » (C. Trav. article L.1226-12).
Cette décision est une confirmation de la jurisprudence constante de la Cour de cassation et, même si elle vise en l’espèce la compétence des délégués du personnel (instance représentative supprimée par l’ordonnance du 22 septembre 2017), la solution a vocation à s’appliquer également au CSE.
La gestion de l’inaptitude du salarié est une question complexe qui recèle de nombreux pièges. N’hésitez pas à nous consulter pour vous accompagner dans le suivi de cette procédure.